HISTORIQUE du 328èmeRégiment d’Infanterie
Formé à Abbeville le 4 août 1914, le 328ème régiment d’infanterie prend dès le 8 août une part active à toutes les opérations de la guerre.
Groupé en deux bataillons sous le commandement du Lieutenant-Colonel Lafitte, il s’embarque tout d’abord pour le C.R. de Laon, puis effectue divers mouvements stratégiques dans la région de Dun-Sur-Meuse.
Dirigé ensuite sur Virton, il se trouve en réserve pendant la bataille de Charleroi. Il participe au mouvement de rempli général, passe la Marne et, reçoit le baptême du feu en coopérant avec la 48ème brigade à une attaque menée contre la ferme des Méandres et les Grandes Perthes (Marne).
Le 12, il franchit à nouveau la rivière, et jusqu’au 15, entre dans la composition d’une des colonnes de poursuite vers le Nord.
Le 20 septembre il relève au bois d’Hanzy, le 272ème R.I., organise sommairement la position, et malgré une réaction violente de l’artillerie ennemie, arrête toutes les contre-attaques allemandes. Les 26 et 27 septembre en particulier, il résiste vigoureusement à la ferme de Melzicourt à de furieuses attaques soutenues par une puissante artillerie.
Les pertes qu’il a subies sont légères, il a fait de nombreux prisonniers.
Il reste en position jusqu’au 14 octobre, et continue ensuite les travaux entrepris en arrière des premières lignes.
Le 20 octobre, le 328ème RI est appelé à relever le 272ème en Argonne dans le secteur compris entre Four de Paris et Saint-Hubert ; il ne le quittera que le 10 juin 1915.
Pendant toute cette longue période d’hiver, entrecoupée seulement de repos de quelques jours, le régiment est contraint de mener la vie morne et sévère des tranchées.
Placées dans des conditions d’installation improvisée, manquant de tout confort, obligées à une vigilance de tous les instants, les compagnies du 328ème s’acquièrent une réputation des plus solides.
Dans ce secteur toujours agité, théâtre de combats quotidiens à Fontaine-Madame, à Blanloeuil, aux Enfants-Perdus, à la Sapinière, malgré une fusillade incessante, un arrosage régulier de bombes et de fréquentes explosions de mines, les Allemands verront échouer toutes leurs tentatives de pénétration dans nos lignes. Accueillies par de vives fusillades, leurs attaques en masse sont fauchées par nos mitrailleuses. Les anciens du régiment conserveront toujours un souvenir ineffaçable des héroïques faits d’armes qui s’ajoutèrent, pendant cette période, aux pages glorieuses de l’histoire du 328ème R.I.
Le 20 octobre au bois de la Gruerie, attaquées en pleine relève, les unités du 6ème bataillon sont entourées et isolées ; défendant pied à pied le terrain qui leur a été confié, elles repoussent de furieuses attaques et bien que décimées, tiennent tête à un ennemi bien supérieur en nombre, solidement retranché et appuyé de nombreuses mitrailleuses.
Du 17 au 21 décembre à la Harazée, sur un terrain accidenté et boisé rendant toutes liaisons excessivement dures, les soldats du 328ème cramponnés à leurs lignes, résistent aux violentes attaques venues de toutes parts.
Par une série d’actes individuels de bravoure et d’audace, au milieu des combats ininterrompus, ils conservent toutes leurs positions.
Le 10 et 11 février 1915, toujours à la Harazée, malgré l’emploi par les Allemands d’un nouveau procédé de combat (bombes asphyxiantes), les vieux territoriaux et réservistes du 328ème donnent une nouvelle preuve de leur vaillance en repoussant ; par des feux de mousqueterie bien ajustés, une attaque en masse dont la violence, ajoutée à l’effet de surprise, devait garantir la réussite.
Le 328ème quitte l’Argonne le 10 juin, il reçoit avant de partir, les félicitations du Généra Duchesne, commandant le 32ème C.A. qui s’exprime ainsi (O.G n° 429 du 32ème C.A.) :
« Le 328èmequitte le 32èmeC.A. auquel il est rattaché depuis 4 mois. Pendant ces 4 mois, le 328ème a soutenu sur les points les plus délicats, une lutte ininterrompue particulièrement dure au cours de laquelle sa valeur militaire s’est nettement affirmée. En toutes circonstances, même aux heures les plus graves, il a fait preuve d’une énergie inlassable, d’un rare sang-froid et d’un courage digne d’éloges.
« Dans la défense des positions qui lui étaient confiées comme au cours des attaques qu’il a conduites, il a montré tout ce qu’on pouvait attendre de lui. Le général commandant le 32èmeC.A. exprime son entière satisfaction à ce beau régiment parfaitement commandé et encadré »
Le 13 juin, le régiment est formé à 3 bataillons par l’adjonction du bataillon de marche du 99ème R.I.
Le 16, il entre en secteur aux Eparges, sur cette fameuse crête, dans un terrain absolument bouleversé et rempli de cadavres, soumis à des bombardements continus ; il entreprend une série de durs travaux pour l’organisation défensive de la position.
Après un séjour de deux mois au secteur du Bois-Haut, Tranchée de la Calonne, il relève le 16 octobre, des éléments de la 105ème brigade au N-E de Tahure ; c’est là qu’il devait s’illustrer de façon inoubliable et gagner sa première citation à l’ordre de l’Armée.
Ce secteur, qui venait d’être conquis de haute lutte quelques jours auparavant, n’était pas aménagé. La première ligne, faite d’éléments de parallèles de départ, n’avait ni boyaux, ni réseaux de fil de fer. Le régiment se met activement à l’ouvrage, et jusqu’au 26, travaille au milieu d’un calme relatif.
Le 27, commence le bombardement des positions, qui se poursuivra, avec une violence croissante, les jours suivants, occasionnant des dégâts et des pertes.
Dans la nuit du 29 au 30, des indices certains d’attaque sont signalés par les observateurs, et le 30 à 8 heures, le bombardement s’intensifie de façon inouïe, bombardement par obus de gros calibre, engins de tranchée, gaz asphyxiants. Il dure 7 heures consécutives ; à 15 heures, les vagues allemandes se précipitent enfin sur nos lignes, et réussissent à y pénétrer.
C’est alors que, malgré les vides importants causés par le bombardement, les 15 et 16ème compagnies contre-attaquent et obligent l’ennemi à s’arrêter.
Les pertes sont sévères, le Colonel, les Commandants, Guerre et Marchal sont blessés. L’ennemi, très éprouvé lui aussi, ne fait pas de nouvelles tentatives ce jour-là.
Le lendemain 31, à 9 heures, le bombardement reprend plus terrible et plus meurtrier encore, le tir s’allonge et fait prévoir l’imminence de la ruée ; à ce moment le 4ème bataillon sort de ses tranchées et se jette à la rencontre des bataillons bavarois, qu’il culbute et disperse. L’ennemi subit des pertes énormes ; épuisé, démoralisé, il regagne ses lignes pour ne plus ne sortir.
Le 328ème a perdu plus de 65 % de son effectif, mais il n’a pas cédé un pouce de terrain confié à sa garde, aussi le Général Pétain lui accorde-t-il cette magnifique citation à l’Armée (O. G. 80 IIe Armée, 12 novembre 1915) :
« Sous les ordres de son chef le Lieutenant-colonel VALLIER, pendant les journées des 30 et 31 octobre 1915, soumis à un bombardement d’une violence inouïe par obus de tous calibres et gaz asphyxiants, bombardement qui bouleversa entièrement tranchées, boyaux de communication et abris et qui décima ses effectifs, en butte à des attaques violentes et répétées, menacé sur son flanc gauche, le 328èmeR.I., non seulement à maintenu dans son intégralité absolue le front confié à sa garde, mais encore par des contre-attaques remarquables d’entrain et de vigueur, a rétabli la situation compromise à sa gauche et a fait subir à l’ennemi, des pertes énormes. Le 328ème vient d’ajouter une page glorieuse à son historique »
« Signé : PETAIN »
1915-1916
Le 1er novembre, le régiment gagne des cantonnements de repos, où il demeure jusqu’au 14 janvier 1916.
Le 14 janvier, il remonte en ligne et occupe le secteur de Chauvoncourt et Saint- Mihiel jusqu’au 20 février 1916.
Relevé le jour de la ruée allemande sur Verdun, le régiment se rend dans le secteur de Calonne en réserve, et travaille à l’organisation défensive des Hauts de Meuse.
Le 18 avril, le 328ème monte en ligne sur la rive droite de la Meuse, à Fleury devant Douaumont, Thiaumont et Souville. Pendant huit jours et huit nuits, il vivra la douloureuse épopée tant de fois écrite, et dont le souvenir ne s’effacera d’aucune mémoire : relèves terribles sur un terrain qu’on n’a pas eu le temps de reconnaître et creusé de trous d’obus pleins d’eau, attaques meurtrières pour un simple talus, la vie dans une mer de boue et de sang, avec un ravitaillement des plus irréguliers et sous un bombardement terrifiant.
Il est relevé le 25 avril.
Après une longue période de repos, pendant laquelle il subit un entraînement intensif, le régiment est appelé le 2 août 1916 à participer à la bataille de la Somme. Il entre en secteur à l’Ouest de Belloy-en-Santerre. Tout est à faire sur ce terrain récemment conquis et complètement bouleversé par notre artillerie. On se met à l’ouvrage, et bientôt le secteur est en état d’offrir la sécurité que les circonstances exigent, mais les poilus du 328ème R.I. sont appelés à remplir une autre mission.
Une attaque est décidée sur le front de la Xe Armée.
Le 4 septembre, l’ordre est donné, malgré un violent tir de barrage ; les compagnies sortent avec un entrain superbe, enlèvent rapidement la tranchée du Regret, celle de Hures, et du Typ.
Le 6, à 15 heures, l’attaque doit reprendre ; le 5ème bataillon en tête, il doit opérer par surprise et sans préparation d’artillerie.
Mais à 14 heures 55, l’unité à gauche sort des tranchées en avance sur l’horaire, les mitrailleuses ennemies entrent en action immédiatement et balayent tout notre front d’attaque. Le 5ème bataillon s’élance néanmoins à l’heure prescrite, précédé de son chef, le Commandant Marchal. Les pertes sont lourdes, les éléments continuent cependant leur mouvement, mais ils tombent à 200 mètres de nos lignes sur une tranchée allemande dissimulant à contre-pente une forte garnison d’hommes. A ce moment, le Bataillon, déjà fortement épuisé, subit une contre-attaque qu’il ne peut plus contenir et qui ne sera dispersée que par le 6ème Bataillon en soutien. Le mouvement doit être arrêté.
Les vides sont grands. Le Colonel reçoit deux blessures, le Commandant Marchal est également atteint ; en outre, 28 officiers et un millier d’hommes sont tués, blessés ou disparus.
Le régiment est envoyé au repos jusqu’au 15 octobre.
Le 10 octobre, le Lieutenant-Colonel Vallier nommé au commandement de la 7ème brigade, est remplacé à la tête du 328ème par le Lieutenant-Colonel Blaison.
Le régiment reprend les lignes le 15 octobre dans la même région et le 18, il repousse une forte attaque ennemie, grâce à la vigoureuse action de la 13ème compagnie commandée par le capitaine Hecquet.
Enfin, le 23 novembre, le 328ème quitte la Somme après un séjour de cinq mois au cours desquels se sont confirmées ses solides qualités guerrières.