Étant entré un jour chez l'un de ses voisins, Magister aperçut deux superbes andouilles accrochées aux soliveaux du plancher du grenier. Comme il était très friand de ce mets, l'eau lui en vint aussitôt à la bouche. Il savait que son voisin n'était point généreux et qu'il ne l'inviterait pas à partager avec lui.
Pour satisfaire sa gourmandise, Magister forma le beau projet de s'approprier les deux andouilles.
Comment faire ? bien que fort peu scrupuleux, il n'était cependant point dépourvu du tien et du mien, et il ne se souciait pas d'être considéré comme un voleur. Il fallait donner au larcin qu'il méditait une tournure qui le fit considérer comme une plaisanterie.
Plusieurs moyens d'exécuter son projet se présentèrent à son esprit inventifs ; il s'arrêta à l'un deux, qui lui parut offrir le plus de chance de succès.
Lorsque le soir venu, Magister porta à l'extrémité du jardin de son voisin quelques bottes de paille auxquelles il ; mit le feu, puis il rentra hâtivement chez lui.
A la lueur de l'incendie, le voisin, sa femme et ses enfants coururent dans le jardin en criant : au feu ! Magister, qui n'attendait que ce moment, entra précipitamment chez son voisin en passant par la porte de la rue ; il décrocha vivement les deux andouilles, qu'il cacha sous ses vêtements et sortit en ayant soin de laisser la porte toute grande ouverte ; à son tour, il se mit à crier dans la rue : Au feu ! Au feu !
En un instant, la maison fut pleine de monde ; mais le voisin et la famille revinrent bientôt du jardin et annoncèrent que l'incendie se bornait à quelques bottes de paille qui avaient pris feu.
Ce fut seulement le lendemain que l'on s'aperçut du vol des deux andouilles. Mais qui pouvait être le larcin ?
Il était venu tellement de monde la veille dans la maison qu'il était tout à fait impossible de soupçonner qui que ce fût
Quelqu'un riait bien dans sa barbe en mangeant les andouilles, c'était Magister.